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11 septembre 2016 7 11 /09 /septembre /2016 23:50
L’insouciance de Karine Tuil : un roman efficace et âpre qui s’attaque à notre époque

Malgré l’apparente légèreté du titre, on peut dire qu’elle ne fait pas trop dans la dentelle, Karine Tuil, avec L’Insouciance. Mais notre monde non plus ne fait pas dans la dentelle. Politique, otages, manipulations médiatiques, feuilletons télés taillés à la serpe… Si la fiction d’une époque doit se rapporter au monde tel qu’il est, il me semble que la romancière a bien rempli sa mission, en écrivant ce « page-turner » efficace et plutôt ambitieux.

Les héros de ce roman sont majoritairement des hommes, des ombrageux, bien virils : Osman, un Français dont les parents sont d’origine ivoirienne, poursuit une ambitieuse carrière politique dans l’entourage de l’Elysée sans être du sérail. François Vély, alias Lévy, riche homme d’affaires un peu trouble, est malheureux en amour et victime d’un complot médiatique, à moins qu’il l’ait bien mérité. Romain le soldat musclé, est victime d’un symptôme post-traumatique après son expérience militaire malheureuse en Afghanistan, mais il trouve l’amour. Marion est la seule femme importante de l’histoire : c’est une belle journaliste/romancière qui cherche son destin entre François et Romain. L’intrigue nous emmène de déconvenues en événements tragiques, en passant par toutes sortes de désillusions et de déconfitures : à part dans les trois dernières pages, le bonheur n’y a pas une place de choix… Mais quand on suit les infos sur LCI, franchement, ça ressemble bien à cette succession de sombres nouvelles…

J’en soupçonne certains de reprocher à Karine Tuil le fait qu’elle n’ait pas du tout l’écriture « attendue » d’une femme, car nous sommes souvent victimes dans nos attentes de certains clichés littéraires. C’est sûr qu’il n’y a rien de post-durassien chez elle, que les profils des personnages peuvent aller dans le sens de certains stéréotypes, qu’on a du mal à trouver l’émotion nuancée ou la poésie légère. Mais c’est son style, et je trouve qu’il est affirmé, incisif, un peu rock, populaire, avec des personnages qui souffrent, et surtout un vrai travail de rythme –que j’avais déjà apprécié dans L’invention de nos vies- qui peut être parfois joli. La forme de ce roman n’est pas d’une originalité folle, avec les chapitres qui s’accrochent assez conventionnellement tour à tour à un des personnages principaux. Mais le but de Karine Tuil n’est certainement pas d’écrire un roman expérimental pour des gourmets, c’est plutôt de décrire son époque dans un style coup-de-poing adapté aux lecteurs d’aujourd’hui.

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  • : Effleurer une ombre
  • : Je suis conne comme la lune sans soucis, comme la lune béate qui luit à l'automne, et offre le sourire de sa face blême aux moutons rêveurs, aux filles endormies. Je suis pomme, en somme, et de ce mauvais fruit, sais-tu? La gloire des campagnes monotones (Par qui Dieu sur Eve jeta l'anathème jadis) pleine d'asticots et toute pourrie. Je suis vache mystique des champs nivernais, mâchouillant ma vie végétale dans la paix. Le temps passe, je rumine, bovine herboriste.
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